Considérée comme un problème majeur à l’échelle mondiale, en Haïti, la corruption fonctionne comme un mode de gouvernance précaire (Claire Antone Payton : 2021). Cette dernière, est loin d’être une fatalité, mais une pratique organisée, présente à tous les niveaux au sein des infrastructures du pays. Faisant objet de révision et de réforme, au fil des conjonctures, cette forme de gouvernance n’a jamais été en faiblesse.
Selon le dernier rapport publié en 2018 par Transparency International, Haïti est classée 170e sur 180 pays d’après les données de l’indice de perception de la corruption dans le secteur public. Cette place occupée par elle, montre à quel point la corruption est importante dans ce système.
Dans les pays corrompus comme celui-ci, qui possèdent des ressources minières et naturelles en abondances, la population ne bénéficie même pas d’un quart de ces richesses rares. Pourtant, elle ne cesse donc de subir des exploitations à outrance dans les espaces où se dressent les intérêts politiques et économiques.
Considérée comme le principal obstacle au développement économique et social d’Haïti, la corruption a pris de diverses formes, telles que : le détournement de fonds, la fraude, l’enrichissement illicite, les pots-de-vin, le trafic d’influence, le détournement des ressources financières du pays au bénéfice d’un groupe spécifique, la manipulation, l’intimidation exercée sur le personnel ou les bénéficiaires pour qu’ils ferment les yeux sur les actes de corruption ou y participent (le cas du parlementaire haïtien dans le dossier de chèques), le népotisme, le favoritisme et le mounpaisme etc.
Tous ces leviers, dans cette machine, ont permis à endommager le bon fonctionnement du pays. En ce qui a trait au respect des droits ; la corruption met en péril la démocratie, la gouvernance et les droits de l’homme en affaiblissant les institutions publiques sur lesquelles se fondent les sociétés justes et équitables.
D’une part, elle freine la croissance économique, nuit à l’état de droit et entraine un gaspillage de compétences et de précieuses ressources. D’autre part, lorsque la corruption est omniprésente, les entreprises hésitent à investir face au coût nettement plus élevé de l’activité économique.
Que dire de la justice haïtienne face à ce fléau ?
Depuis l’arrivée de l’équipe du PHTK à la tête de l’État Haïtien, les actes de corruptions se sont exacerbés et l’effervescence au sein du système judiciaire haïtien ne cesse de s’aggraver, en raison d’un manque de leadership national éclairé. C’est ainsi qu’en 2022, l’Ex président Joseph Michel Martelly est tombé sous les sanctions du Canada, à cause de sa complicité avec les gangs armés et sa liaison au système de corruption en Haïti. De plus, en octobre 2023, un rapport de l’ONU relève que Michel Martelly est impliqué jusqu’au cou dans le financement des gangs armés dans son pays natal ainsi que son fils Olivier Martelly et plusieurs autres personnalités de leur gouvernement sont indexés dans le gaspillage du fond pétrocaribe.
Par ailleurs, avec le gouvernement de Jovenel Moïse, notre système judiciaire s’est détérioré de plus en plus. Ce dernier est devenu impopulaire faces aux soulèvements massifs de la population haïtienne qui est livrée à la violence des gangs armés sur tout le territoire national.
Il fallait attendre l’arrivée de maître Berto Dorcé comme Ministre de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP), en 2022, pour que des mesures soient prises afin d’améliorer le fonctionnement et la performance du dit ministère en matière de justice.
Certaines mesures ont été prises en vue de la reconstitution du Conseil national de lutte contre le blanchiment des avoirs (CNLBA), tel que prévu par la loi du 21 février 2001. Ceci devrait permettre à l’UCREF d’être plus active et plus performante dans la lutte contre les crimes financiers. Une telle démarche visait à rendre l’État haïtien plus apte à rendre compte auprès des organismes de contrôle. Des avancées réalisées dans le cadre des actions contre ces crimes grâces aux directives qui seront données à ces institutions d’évaluation (CNE) en formation.
Dans ce même ordre d’idée, concernant les mesures adoptées dans le cadre de ses dispositions conformément liées aux engagements internationaux , une délégation du MJSP s’est rendue à Trinité et Tobago pour une rencontre de haut niveau du GAFIC dans le but de fournir des renseignements sur les dispositions prises par le gouvernement dans la lutte contre de blanchiment des capitaux et aussi rassurer les partenaires internationaux.
Mais, ces mesures là sont-elles satisfaisantes compte tenu des faiblesses profondes de nos institutions républicaines qui perdent leurs rigueurs et leurs éthiques ? Que deviennent-elles aujourd’hui? Y aura-t-il une continuité?